Aujourd’hui
je vous propose à nouveau une bande-dessinée sur le blog. Rien à voir avec
l’enquête surprenante de Nuit noire sur
Brest, que je vous avais présentée dernièrement. Rien à voir ? Pas
tout à fait. Nous avions embarqué dans ces pages sur un sous-marin républicain,
et nous reprenons cette fois-ci le chemin de la mer. J’aime beaucoup les
romans, musées, films en lien avec l’univers maritime. Comme nous ne sommes pas
à une contradiction près vous noterez que j’ai choisi de bloguer sur une région
qui n’a aucun accès à la mer… Revenons-en à la bande dessinée du jour,
intitulée sobrement Lépante.
Dans
mon parcours scolaire, puis à la faculté d’histoire je n’ai presque jamais
croisé la bataille de Lépante (Grèce). Le nom me disait bien quelque chose,
mais au même titre que Marignan-1515 évoque toujours un vague souvenir à tout
le monde, de là à dire que d’aucuns pourront vous expliquer les enjeux de la
bataille, il y a un fossé. Lépante c’était donc pour moi une bataille,
maritime, qui s’était déroulée sous Philippe II. Mes lectures de Perez et
Bennassar avaient fini par effriter mon ignorance à propos du 7 octobre 1571.
Je restais néanmoins relativement peu au fait de ce combat. Un peu de contexte
donc, avant de parler du livre du jour. La bataille oppose les Ottomans à la
Sainte Ligue. Cette dernière regroupe plusieurs états catholiques, dont
l’Espagne. Ne cherchez pas la France. Son roi, tout de même parfois qualifié de « fils
aîné de l’Eglise », boude la bataille pour différentes raisons. Charles IX
a vingt-et-un ans et a bien des soucis à gérer, comme les guerres de religion.
De plus les relations de la France et des Ottomans sont à certains moments
assez cordiales, ainsi dans les années 1540, la flotte ottomane a pu séjourner
un hiver à Toulon. La France n’étant pas là, l’Espagne se trouve être la grande
puissance de la Sainte Ligue. Cette position est soutenue par le Pape qui nomme
le jeune Don Juan d’Autriche, demi-frère du roi d’Espagne, à la tête de la
flotte chrétienne. La bataille de Lépante fut une défaite pour les Ottomans et
signa un tournant dans leur relation avec l’Europe Occidentale.
La
bande dessinée fait le choix de relater les événements entre le début du mois
de septembre et la fin de la bataille (7 octobre 1571). Pour cela les auteurs
sélectionnent deux trios, que le lecteur va suivre tout au long du récit. D’un
côté, nous vivons le destin de trois galériens, des espagnols et un vénitien,
partageant un même banc, qui s’inquiètent de la bataille à venir. En effet si
la défaite des Ottomans signerait la victoire de leurs pays, elle se solderait
probablement par le naufrage du bateau auquel ils sont enchaînés. Nous suivons
donc leur conflit, leurs plans, et leur vécu des préparatifs de la bataille. De
l’autre côté nous partageons le quotidien de trois soldats de la Sainte Ligue,
Damiano, Sancho et Miguel. Ce dernier n’est autre que Miguel de Cervantès, dont
on sait qu’il a effectivement participé à la célèbre bataille de Lépante. On a
donné à ses deux compagnons les traits physiques traditionnels des deux héros
du roman de Don Quichotte. En plus de nos six protagonistes, certaines planches
de l’ouvrage proposent des scènes au Vatican ou au conseil de guerre du sultan
Selim II.
La
collection des grandes batailles navales,
chez Glénat, propose de découvrir ces grands faits militaires de par le
monde et depuis l’antiquité. Aujourd’hui la maison d’édition en a publié une
dizaine. Le directeur de la collection de la série, Jean Yves Délitte, est
peintre officiel de la marine belge, un connaisseur donc, qui s’est spécialisé
dans la bande dessinée maritime. On lui doit déjà une série sur le Belem, une
sur un sous-marin allemand, des ouvrages sur l’Hermione, le Bounty et bien
d’autres célèbres bâtiments. Pour Lépante il collabore avec Frederico Nardo.
Les deux artistes nous offrent une belle bande dessinée, le dessin est un peu
dur et ne plaira pas à tout le monde, personnellement je trouve qu’il rend bien
l’univers impitoyable du combat maritime. Le réalisme et le détail sont très
agréables et l’œil ne s’ennuie jamais quand il parcourt les planches de
l’ouvrage. L’idée de suivre Miguel de Cervantes dont on ne retient pas toujours
le passé militaire est intéressante. J’ai visité la maison de Cervantes à Valladolid et c’est toujours l’écrivain qui est mis en évidence. Le flanquer de
deux acolytes qui auraient pu inspirer ses écrits est séduisant. Le suivi des
galériens est vraiment très instructif, on réalise rarement que le combat
maritime du XVIe siècle se joue encore à l’aide de galères qui rappellent
l’antiquité. Le cahier documentaire revient longuement sur ce point.
Je
ne peux conclure cet article qu’en vous conseillant la lecture de cette bande
dessinée. Elle éclairera le voyage en Espagne si l’époque moderne et le règne
de Philippe II vous intéressent. Le roi tirera en effet profit de cette
victoire, mais les conséquences politiques de la bataille, ou sa réception dans
l’opinion ne sont pas évoquées dans le récit dessiné. Un paragraphe dans le
cahier final pallie en partie à ce manque. N’hésitez pas à me dire ce que vous
en avez pensé si vous avez l’occasion de la lire.
A bientôt pour de nouvelle visite.
Référence de l’ouvrage :
DELITTE J.Y., NARDO F., Lépante – Les grandes batailles navales, Ed. Glénat, 2017.
Une source intéressante disponible en ligne :
CAMPANA C., VIALLON M., Les célébrations de la victoire de Lépante. La fête au XVIe siècle,
Sep 2002, Le Puy-en-Velay, France. pp.55-78. ffhalshs-00562664f
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire