Cloître de los Reyes |
Dernier article de notre série sur
les monastères royaux avec une promenade à Avila. Situé dans un quartier un
peu excentré, hors les murs, le monastère Santo Tomas est un paradoxe ; à
la fois une attraction très importante de la ville et en même temps hors du parcours
touristique intra-muros et teresiano. Ce monastère par ses multiples usages, et ses rôles particuliers possède une histoire très intéressante et dont la
création, la pérennisation, les agrandissements, et même les atouts
touristiques, sont le fruit de la cour et de la royauté.
Entrée de l'église |
La fondation du monastère remonte au
règne des Rois Catholiques, dans un temps finalement sensiblement proche de la construction du monastère San Antonio el Real, que nous avons vu dans l’article précédent. Ce
n’est pas la royauté qui est à l’origine de ce monument religieux. C’est le
trésorier du couple régnant qui, comme beaucoup de nobles, décide d’investir
dans une entreprise religieuse visant l’édification d’un monument : chapelle,
église, monastère… Cet homme, Hernando Núñez de Arnalte, décide donc de
construire un monastère dominicain à Avila. Malheureusement ce mécène décède en
1476, sans que le chantier n’ait pu commencer. Sa veuve reprend donc les rênes
du projet. Finalement le travail ne commence qu’en 1483. Ceci ne s’est pas fait
sans l’appui d’un religieux, et celui-ci était tristement célèbre : Tomas
de Torquemada. Celui qui va devenir un inquisiteur de renom fréquente
assidument la cour puisqu’il est le confesseur du roi. Il faudra dix ans pour
achever la première version du monastère. En 1496, Torquemada se retire dans le
monastère qu’il a fondé, il y décède et y est enterré en 1498.
Cloître del Noviciado : le plus ancien |
Cloître du Silence |
Les rois entrent dans l’histoire du monument durant cette période. Nous avons vu que leur entourage proche s’était déjà beaucoup investi dans l’édifice. Aujourd’hui il nous reste de la relation des rois avec le monastère, un tombeau et un cloître. Parmi les cinq enfants d’Isabel la Catholique et de Fernando d’Aragon, un seul fils et héritier, Don Juan, né en 1478. Son éducation, confiée aux dominicains de Salamanque, commence dès l’âge de huit ans. Il eut, toute sa courte vie, une constitution fragile. Décédé en 1497, sa mort, peu expliquée, secoue toute la monarchie, le jeune prince de dix-neuf ans n’a pas d’héritier, ni de frère cadet. On pense aujourd’hui à la tuberculose comme cause du décès. Le jeune prince Juan s’était marié quelques mois plus tôt à une Habsbourg lors d’une cérémonie à la cathédrale de Burgos, mais n’avait pas eu le temps de devenir père. Voilà pourquoi c’est son neveu Charles, l'empereur de Yuste, qui accédera plus tard au trône.
Revenons-en
à notre jeune prince décédé, il est d'abord enterré dans la ville où il
s’est éteint, Salamanque. En 1510, ses parents envoient Domenico Fancelli
réaliser le sépulcre où il reposera au monastère d’Avila. Le sculpteur italien
le réalise en marbre de Carrare. Il l’achèvera en 1513. En parallèle du rôle de lieu de mémoire pour
leur fils, les rois catholiques font agrandir le monastère et en font leur
résidence d’été. Plus tard le couvent bascula une partie du cloître de los
Reyes en Université qui devait perdurer jusqu’au XIXe siècle. Un autre
personnage célèbre et inévitable dans la ville a foulé le sol de ce lieu, Sainte Thérèse, dont vous pourrez, si cela vous tient à cœur, observer le
confessionnal. Mis à part ce dernier point, le monastère ne connut point de
grands événements les siècles qui suivirent, si ce n’est un incendie en 1699. Le
monastère est désormais devenu un géant, avec ses trois cloîtres, son église,
son statut royal. On distingue le cloître del Noviciado, le cloître du silence, et celui de los
Reyes. Il s’installe comme institution religieuse et universitaire, dans l’Espagne
de l’époque moderne.
Le monastère était donc devenu un
monastère royal, est mena une vie paisible jusqu’à… la guerre d’indépendance,
évidemment. 1809, les lieux sont envahis par les troupes françaises et le premier
à en faire les frais c’est le tombeau de Don Juan, qui porte encore les
stigmates des coups portés par les soldats. Ses restes disparaissent et on ne
sait ce qu’ils sont devenus. Comme souvent c’est la saisie de Mendizabal, en
1835, qui pousse à l’abandon des lieux. De là les malheurs ne cesseront de le
frapper, contre lesquels l’inscription aux monuments historiques en 1931 n’aura
pas d’effet, deuxième incendie suite à une bombe en 1936, troisième incendie en
1949. Les religieux, qui sont revenus, et les pompiers réussiront à le sauver.
Aujourd’hui le monastère, en plus
des activités des religieux, est devenu un lieu touristique, restauré, et
contenant deux petits musées. D’une part, un musée des sciences naturelles et un
musée oriental. Le premier, qui accueille animaux empaillés et différents
organismes dans le formol, a été restauré en 2008. Ses trois salles n’offrent
pas forcément un panorama exceptionnel mais c’est assez inattendu dans un
monastère. Il rappelle le rôle d’enseignement de
l’ordre, et les supports pédagogiques des XIXe et XXe siècles. Ce musée permet de se souvenir
aussi que parmi toutes les activités du monastère, il fut une université. Le
second musée, d’art oriental, ouvert en 1964, propose de découvrir l'art des colonies espagnoles. Comme le très grand musée oriental de Valladaloid il est le fruit des relations
entre l’Espagne et les communautés missionnaires des ordres dans les pays d’Asie.
Un musée qui n'est pas très attrayant malgré une restauration récente |
Prenez le temps de visiter ce
monument, dont l’audioguide en français permet de bien comprendre l'histoire. J’espère que
vous aurez plus de chance que moi, et que vous le verrez sous le soleil, mais
même en cas de temps médiocre la visite est à ne pas rater.
Je vous donne rendez-vous à Alba de
Tormes pour notre prochaine visite.
CERVERA
C. « El Príncipe que pudo salvar a los Trastámara pero murió por su
«desenfreno sexual » in abc.es le 9
avril 2015
SANCHEZ
A. « El Museo de Historia Natural de Santo Tomás reabre sus puertas
renovado » in 20minutos.es le 15
janvier 2008
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