mardi 19 janvier 2021

La série El Cid : Une fenêtre sur la Castilla y León ?


 C’est un euphémisme de dire que l’Espagne me manque. Tout est donc bon pour voyager virtuellement en Castille. Au hasard de mes visionnages, je viens de passer cinq soirées dans l’Espagne du Cid. Amazon prime s’est attaqué à la vie du légendaire chevalier castillan en proposant dans le rôle-titre l’acteur Jaime Lorente. Nous avons fréquemment parlé sur le blog du légendaire Cid, je vous avais proposé il y a quelques années un dossier à son propos : « Il était une fois... Rodrigo Diazde Vivar, coups de théâtre en série. ». Il me semblait donc intéressant de découvrir une version 2020 du héros de la Castille, mis en avant à longueur de sites touristiques.

Il ne s’agit pas, du moins dans cette première saison, de traiter des grands exploits du Cid. Ces cinq épisodes sous proposent de suivre un Rodrigoz Diaz de Vivar qui n’est même pas encore chevalier. La série s’attarde principalement sur les intrigues de la cour du roi Fernando Ier de León où Rodrigo passe une partie de sa jeunesse. Le Cid apparaît d’abord comme un personnage secondaire qui se retrouve mêlé aux intrigants à la suite d’une série d’événements indépendants de sa volonté.

L’image donnée de l’univers du Cid est intéressante entre les royaumes chrétiens et musulmans. On ne nous présente pas directement Rodrigo en champion incontesté d’une chrétienté triomphante. On découvre un monde de suzerains et de vassaux dont la religion n’est pas forcément partagée, les tributs faisant la loyauté. L’argent n’a pas de religion. On perçoit toute la complexité de la mixité religieuse de la péninsule dans la scène de la prière où chrétiens, juifs et musulmans s’observent en réalisant leurs rituels dans une ambiance tendue. La série promet donc de ne pas proposer une vision trop manichéenne et trop simplifiée des rapports entres les forces en présence. Quant à Chimène, dont l’imaginaire en a fait le grand amour du Cid, leur relation bien qu’importante est loin d’être l’affaire centrale. De nombreux indices laissent supposer que ceci sera plus développé à l’avenir. Une deuxième saison a été commandée par Amazon, on ignore évidement quand elle sortira, les tournages étant largement bouleversés par la situation sanitaire actuelle.

Cette rapide présentation de la série faite, venons-en à ce qui a réellement motivé l’écriture de cet article : les lieux de tournage. Soria est une des provinces qui a le plus servi dans cette première saison, bien qu’elle n’apparaisse nullement dans le récit. Mais la province a l’avantage d’avoir conservé des monuments du Moyen-âge central en excellent état. Vous retrouverez les rues de la bourgade de Calatañazor à laquelle j’avais consacré un article. Bien que plus tardives que l’époque du Cid, elles font largement illusion. Un des châteaux qui sert à plusieurs reprises pour représenter l’extérieur de la demeure de Fernando Ier n’est autre que le Castillo d’Almenar de Soria. C’est aujourd’hui une propriété privée, l’accès pour les visites n’est pas impossible mais très limité. Je l’ajoute tout de même à mes possibilités de détours pour un prochain voyage. Autre lieu, le célèbre pont de Frias (Province de Burgos), localité que je prévois depuis plusieurs années d’aller voir. N’oublions pas, élément primordial pour les rois du León, l’intérieur du panthéon de San Isidoro qui apparaît à plusieurs reprises. C’est ici un décor de studio.    

Calatañazor

Enfin notons que j’ai aussi découvert des lieux qui ne manqueront pas de figurer dans un de mes prochains voyages. Je pense entre autre au Salto del Nervión, une chute d’eau, qu’on ne voit que dans un court plan spectaculaire. Après recherche, je l’ai trouvé à la frontière de la Castille et du Pays Basque.

Je vais tenter de ne pas trop m’étendre sur les lieux de tournage hors de la Castille. Mais sur Saragosse et le palais de l'Aljafería, je ne peux faire l’impasse. C’est un magnifique bâtiment, témoignage de la domination des royaumes musulmans dans le nord de l’Espagne. C’est une visite dont je n’ai pas, encore parlé sur le blog, car hors de ses frontières traditionnelles. Néanmoins j’en garde un excellent souvenir et je vous invite vraiment à pousser les portes de ce palais si vous passez dans les alentours.

J’ai envie de croire que la série peut être une chance pour la Castilla y León, une sorte de grande publicité. Néanmoins je ne me fais que peu d’illusion, dans la région on exploite très peu le fait que tel ou tel monument ait servi pour un lieu de tournage. A deux pas de la Castille, à Trujillo j’ai par exemple pu visiter l’impressionnante forteresse de la localité. Quelle surprise de ne pas y voir une référence à la série « Game of Thrones » qui a été tournée ici. C’est pourtant un sacré produit d’appel. Pas d’illusion donc, je ne pense pas qu’une série comme le Cid sera exploitée par les offices de tourisme.

Autre souci, si vous vous promenez sur internet, lisez les critiques, vous constaterez que la Castille, le León, l’Aragon ont décidément bien du mal à exister dans l’imaginaire français. On voit bien la surreprésentation de l’Andalousie matraquée à longueur de magazines et de séquences sur Al-Andalous en cours d’espagnol, dans les critiques des téléspectateurs. Un exemple de ces confusions dans un commentaire de téléspectateur sur senscritique « Il faut dire qu'a la base l'histoire originelle de l'Andalousie au 11e siècle est propice à tous ces jeux de dupes, d'intrigues, de conquêtes ». Espérons que la région réussira tout de même à profiter du succès de cette série qui n’est pour l’instant disponible que via Amazon Prime en France. La question se posera aussi de l’adhésion des Français à cette version du Cid, plus proche de la réalité historique que celle de Corneille si chère à leur cœur.

Je ne m’exprimerai pas sur la justesse historique de la série, je n’ai pas les compétences, l’histoire médiévale n’étant pas ma tasse de thé. Globalement j’ai passé un bon moment devant ces cinq premiers épisodes tournés dans la péninsule. La durée des épisodes, en moyenne une heure, permet de développer correctement l’intrigue de chaque chapitre. Même si Jaime Lorente ne correspond pas à l’image que je faisais du Cid, j’ai fini par me faire à cette proposition. J’attends maintenant avec impatience de voir si nous découvrirons d’autres lieux emblématique de la vie et des combats du Cid, San Miguel à Palencia ou le château de Gormaz par exemple

Castillo de Gormaz


Je vous souhaite un bon visionnage et vous signale qu’en suivant ce lien vous retrouverez tous les articles du blogévoquant le Cid

1 commentaire:

  1. Bonjour
    Je suis une fan de l'Espagne et de son époque médiévale... et du Cid bien sur que j'ai connu par la pièce de Corneille mais aussi par le film avec Charlton Heston, qui montre déjà la complexité des rapports entre les trois royaumes et les taïfas.
    Je la connais déjà bien à travers ces monuments médiévaux puisque c'est ce qui m'intêresse et je compte bien aller visiter les sites dont vous parlez.

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