Reprenons notre série d’articles sur les églises avec une étape à Salamanca. J’ai beau vous avoir proposé des dizaines d’articles sur cette ville, il y a encore des nombreux éléments du patrimoine qui n’ont pas été mis à l’honneur dans ces pages. Le petit monument que je vous emmène visiter aujourd’hui est resté longtemps un mystère pour moi. Lors de mon dernier passage à Salamanque, en 2022, le hasard a permis que j’en pousse enfin la porte. Je vous emmène découvrir son histoire et jeter un coup d’œil à l’intérieur.
Il faut se rendre sur les rives du Tormes, juste à côté du célèbre pont romain et traverser le skatepark en contrebas de la Casa Lis. Cette église excentrée se démarque par un assemblage de briques, loin de la pierre de Villamayor qui règne sur la ville. Extérieurement le bâtiment semble parfait, très propre, presque neuf, nous reviendrons sur cette étrange sensation plus loin. Commençons par les origines, au milieu du XIIe siècle. L’église est, comme les deux précédentes, à la croisée de l’architecture romane et de l’influence de la culture musulmane. Dédiée à Santiago, elle s’inscrit dans les routes qui mènent à Saint Jacques et restera, toute son existence, un rappel du lien qui unit Salamanque à l’apôtre de Compostelle. Le 25 juillet, fête de Santiago, elle a connu les temps de célébration annuelle. Le chemin passe à deux pas de là. Le monument connaît de nombreux ajouts, notamment baroques pour son intérieur. Malgré l’importance du saint dont elle porte le nom, on la laisse progressivement se dégrader. Les photos de la première moitié du XXe siècle font peine à voir.
Dans les
années 1950/1960, l’église subit une restauration de fond. Quand je dis
« qu’elle subit », ce n’est pas anodin, aujourd’hui ce travail est
très contesté. L’église que vous voyez actuellement n’a rien à voir avec celle
que vous auriez pu admirer dans les années 1930, par exemple. On doit ce travail
controversé à l’architecte Anselmo Arenillas Álvarez (1892-1979) spécialisé
dans la restauration de monuments religieux. Originaire de Valladolid, ses
responsabilités d’architecte en chef de la Vieille Castille lui permirent d’œuvrer
dans sa région natale. Il supervise de nombreux projets, rédige des documents sur des restaurations cruciales comme cette de la Plaza Mayor de
Salamanca. Revenons donc sur notre église. Ici, certains spécialistes du XXIe
siècle, reprochent une restauration trop radicale, qui n’a presque rien laissé du
bâtiment d’origine.
Quand Anselmo Arenillas Álvarez entame
la restauration, il a face à lui une ruine dont il ne nous reste que quelques photos.
Javier Rivera Blanco a produit un long document sur le sujet que je
vous invite à consulter en suivant ce lien. Il y met en avant les
changements importants menés durant plus d’une décennie de restauration, par
exemple changement de place des entrées, déplacement des éléments principaux et
suppression de ce qui ne correspondait pas à ce que l’on imaginait à l’époque être
une église médiévale. Vous constaterez, à la lecture du rapport illustré que
nous avons presque une reconstruction plus qu’une restauration. Comme de
nombreuses autres églises, celle-ci avait gagné au fil des siècles
d’encombrantes maisons voisines, que la restauration fit disparaître, d’où
l’impression qu’elle est aujourd’hui au milieu de rien.
Si elle est l’une des églises les plus anciennes de la ville sur le papier, vous seriez déçu si vous cherchiez de l’authentique. Cette église raconte aussi les aléas des restaurations, souvent édifiées sur de bonnes intentions. De la silhouette de l’église originelle vous ne retrouverez presque rien. Poussez tout de même jusqu’aux rives du Tormes pour admirer ce petit monument oublié de Salamanque, peut-être aurez-vous la chance de pouvoir jeter un œil à l’intérieur, si vous arrivez à l’ouverture ou à la fermeture d’une manifestation comme ce fut le cas pour moi. Cette visite vous incitera sans nul doute à prolonger votre découverte hors du périmètre de l’ancienne muraille, vous êtes à deux pas du musée de l’automobile ou de la statue de José Ledesma Criado.
Belle découverte de la ville
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