Retour
à Burgos, pour découvrir un monument qui est loin d’être mon préféré, mais qui
vaut le détour. Pour le rencontrer il faut rejoindre la rive gauche de
l’Arlanzon, non loin du musée de l’homme. Ce monument a la particularité de
rendre hommage, non pas à un, mais à quatre personnages différents, quatre
religieux. Je vais, volontairement ne faire que de très courtes biographies des
quatre personnages, puisque d’autres monuments me donneront le loisir de les
développer.
La
province se targue d’avoir vu naître des hommes on ne peut plus importants pour l'ordre dominicain, tenez à commencer par son fondateur : Santo
Domingo/Saint Dominique. C’est le personnage qui se trouve au sommet du
monument. Né en 1170 dans un petit village de Caleruega, à environ 75 km au sud de Burgos, le
petit garçon est sûrement issu d’une famille noble. Cadet de famille, il est
obligé de choisir entre les armes et les ordres, son éducation étant très tôt
prise en main par le monde ecclésiastique, notamment un de ses oncles, il devint
finalement moine. Il finira, suite à diverses péripéties, par s’installer dans
la région de Toulouse et jeter les bases de son nouvel ordre. Cette communauté religieuse sera particulièrement importante durant les siècles suivants, et
fournira tout de même quatre papes à Rome au cours de l’Histoire. Aujourd’hui
les dominicains sont 6 000 dans le monde entier.
Les
deux autres personnages sont indissociables l’un de l’autre. Côté nord,
Francisco de Vitoria. Je vous le présenterai plus en détail quand je me
pencherai sur sa statue qui se situe à Salamanque. Né à Burgos en 1485, on en
est presque certain aujourd’hui, il intègre les dominicains à l’âge de vingt ans. Il
s’en va à Paris pour suivre ses études de théologie, là il sera confronté à de
nombreux textes, il y sera marqué par l'oeuvre Saint Thomas d’Aquin. Il vient à
Salamanque en 1526 enseigner la théologie, après l'avoir fait au Colegio San Gregorio
à Valladolid (actuel musée de la sculpture). Il meurt à Salamanque après une
carrière de deux décennies dans l’université.
Coté sud du
monument, Domingo de Soto, né à Ségovie à la fin du XVe siècle, fut notamment
acteur du concile de Trente pour le compte de son roi, Charles Quint. Une
partie de sa formation s’effectua dans le couvent dominicain de Burgos. Il assiste et prend part au débat qui inspira la Controverse de Valladolid (Un dossier du mois s’imposera peut-être
à ce sujet un jour), et prend parti pour Bartolomé de Las Casas. En effet, comme ce dernier, Francisco
de Vitoria et Domingo de Soto essaieront de défendre une colonisation des
Amériques plus respectueuse des autochtones, du moins correspondant plus aux
valeurs chrétiennes qu’ils défendent. Leurs travaux serviront de base au droit international. Domingo de Soto fut aussi enseignant au
couvent San Estaban de Salamanca. Il décède en 1560, quatorze ans après
Francisco de Vitoria, lui aussi à Salamanque.
Dernier
personnage représenté, par un simple médaillon, Santiago Ramírez Dulanto, théologien
aussi, mais du XXe siècle. Né en 1891 de parents paysans, dans la province de
Burgos, excellent élève au séminaire, il rejoint les dominicains en 1911.
Etudiant en philosophie, il ira de l’université dominicaine des Asturies à Rome
pour poursuivre son cursus. Il revient dans la région, précisément au couvent
San Esteban de Salamanque en 1920 pour y enseigner. Il passe ensuite plus de
deux décennies à Fribourg en Allemagne. Retour en Espagne pour Madrid, en 1945, puis à nouveau Salamanque. Il est à nouveau muté, cette fois pour la Cantabrie dans les années 1960. Tout
au long de sa vie il s’implique dans une longue réflexion sur la théologie,
dans une période de grand changement pour son église, et participe notamment au
Concile Vatican II. Son importance dans le débat philosophique est allée plus
loin que la simple frontière espagnole puisqu’il a tenu conférences et débats aussi bien dans des pays proches, comme la France, qu'outre Atlantique. Il est décédé à Salamanque en 1967.
Le
monument date de 1970, il veut illustrer la continuité religieuse du XIIe
siècle au XXe siècle. Du fondateur des dominicains, à Santiago Ramirez, en
passant par les théologiens de la Renaissance il propose un panorama des plus
grandes figures de l’ordre dominicain liées à la province. Vitoria, Soto et Ramirez
déjà réunis dans la mort, puisqu’ils dorment à jamais dans le couvent San Esteban
dans une pièce joliment nommé Panteón de los Teólogos, se retrouvent donc à
nouveau ensemble sur ce monument. Érigé pour le huitième centenaire de la
naissance de Saint Dominique il s’inscrivait alors dans une année dédiée au
fondateur de l’ordre mendiant, puisqu’il rappelle aussi l’existence, à deux pas
de là, d’un couvent de dominicains, celui de San Pablo, disparu au XIXe siècle.
Il se trouvait à l’emplacement du musée de l’évolution humaine actuel.
Un
monument, pas forcément très esthétique, encore que… mais qui en dit beaucoup
sur la fierté de la ville d’avoir compté parmi ses enfants quelques célébrités dans le monde religieux, et pas des moindres. Mais il manque une vraie mise en
valeur de ce monument pour inciter les promeneurs à s’arrêter, à le comprendre. J'espère vous avoir quelque peu éclairé sur ces statues méconnues.
A bientôt pour Noël
BRUNO Joseph « Où naquit
Francisco de Vitoria, O.P ? » In: Revue néo-scolastique de philosophie.
34ᵉ année, Deuxième série, n°34, 1932. pp. 247-249.
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