La
Plaza Mayor de Salamanque, si elle reprend les canons dictés par la place de Valladolid, est plus prestigieuse, moins austère. On ne s’étonnait pas de ces
traits de caractère qui correspondaient au roi Philippe II, régnant lors de
l’aménagement de la place à Valladolid. De même les plans de la place de
Salamanque reçoivent l’assentiment de Philippe V, et les deux places sont aussi
différentes que le sont les châteaux des deux rois. Autant celle de Philippe II
à Valladolid symbolise la rigueur, à contrario des places médiévales, comme le
faisait son château/monastère de l’Escorial ; autant la place de son descendant
est raffinée, travaillée, splendide à l’image de son petit Versailles espagnol, la Granja de San Ildelfonso.
La mairie de Salamanca |
Revenons donc
à la Plaza Mayor, œuvre d’Alberto, qui travaille avec d’autres architectes et
sculpteurs parmi lesquels ses neveux Nicolas et José. L’ouvrage trouve son
inspiration dans différentes places déjà réalisées comme celle de Madrid, et
s’accorde avec les préoccupations de son temps, lieu de vie, lieu d’échange et
place royale. Cette immense réalisation dotée de 88 arcs et 247 balcons ne
s’est pas faîte aussi vite que l’auraient espéré certains. En réalité plusieurs
phases sont nécessaires pour la réalisation de cet ouvrage monumental. En 1733
l’aile Est est la première à être terminée. Les travaux vont être
énormément ralentis à partir de 1735 par des procès menés par certains habitants
qui ont perdu leurs logements à cause du projet. Après le décès de
Churriguera, Andres Garcia Quiñones termine les travaux en réalisant notamment
la mairie.
Médaillon de Vasquez de Coronado |
En 1846 on
cesse une première fois les corridas sur la Plaza Mayor, on se penche sur
son aménagement. A partir de 1869 la place va perdre l’apparence que nous lui
connaissons aujourd’hui pour s’apparenter de plus en plus à un jardin avec une
fontaine en son centre. J’ai découvert d’anciennes photos à la filmothèque de Castilla y Leon, à Salamanque justement, qui permettent de prendre la mesure de
ces changements. Pour les découvrir, demandez s'il est possible de consulter les ouvrages de la bibliothèque. Et, mais c’est un avis personnel, je trouve qu’un peu de
verdure ne nuisait pas dans ce décor très minéral. Cette place était devenue un lieu
de rencontre, mais restait un lieu de célébrations et de fêtes, on y avait même
installer un petit kiosque, qui fut d'abord en bois au début du XXe siècle.
La deuxième moitié du XXe siècle voit la fin
définitive des jardins. En 1954 les derniers carrés de verdure disparaissent suite à
une visite de Franco. Cette place a pour lui toute son importance car elle symbolise
en partie son accession au pouvoir puisqu’il y rencontra pour la première fois
en tant que chef d’état les ambassadeurs d’Hitler et Mussolini. En 1956 un
concours est organisé dans le but de créer un élément central pour décorer la
place, comme une fontaine ou une croix. Finalement ce projet sera écarté. En
juillet 1972 a lieu le dernier spectacle de tauromachie sur la place. En effet
en 1973 elle est classée comme « bien d’intérêt culturel », pourtant
aujourd’hui, selon les services du patrimoine, il est plus que temps de lutter
contre sa détérioration.
une après midi de printemps sur la Plaza Mayor |
Lieu de vie
pour les touristes comme pour les habitants de la ville il faut évidement la voir le
jour, mais aussi la découvrir la nuit illuminée et animée. Là un groupe de Tunos a
pris possession d’une terrasse, ici les enfants se poursuivent sous le regard
attendri des grands parents, plus loin des touristes épuisés admirent le monument,
assis sur l’un des rares bancs disponibles. Certes on n’attend plus sa place en terrasse comme en 2010 lors de mon premier voyage, la crise économique a rendu les gens plus attentifs à la dépense, mais l’ambiance qui règne à Salamanque, sur
cette place, ne semble jamais pouvoir s’éteindre. Chaque été, quand je m’assois
sur cette place je sens battre le cœur de la ville, et c’est un des plus beaux
moments des mes voyages dans la région.
A consulter, ce travail sur l’œuvre d’Alberto
Churriguera en autres:
Damisch Hubert. L'œuvre des Churriguerra : la « catégorie »du masque. In:Annales. Économies, Sociétés, Civilisations. 15e année, N. 3,
1960. pp. 466-484.
Je ne connaissais pas du tout, merci de faire découvrir ce bel endroit et pour la rédaction d'un article aussi détaillé ! Ça me donne envie d'y mettre les pieds et de découvrir pour "de vrai" !
RépondreSupprimerUne soirée sur Plaza Mayor de Salamanque c’est une expérience à vivre, vraiment je ne peux que te conseiller d’aller la découvrir « en vrai ».
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