Palacio de Monterrey : Ses portes s'ouvrent au public

            Je me demandais comment rouvrir le blog, ce fut rapidement une évidence. Il me fallait partager avec vous ma découverte de l’année dont je vous parlais dans le bilan de mon dernier voyage. Nous allons découvrir l’intérieur du Palais de Monterrey, une visite que j’attendais depuis douze ans. A chacun de mes voyages je m’étais heurtée aux portes closes du palais. J’ai eu le temps d’imaginer mille fois l’intérieur, j’aurais pu être déçue, il n’en est rien. Il n’y a pas de doute, cette nouvelle attraction touristique est pour moi un incontournable de la ville. N’étant pas venue à Salamanca de 2018 à 2022 je n’avais pas eu le plaisir de faire la visite plus tôt.

            1539, l’Espagne où Charles Quint règne depuis presque quatre décennies est un empire rayonnant sur toute l’Europe mais aussi sur tous les océans. Parmi sa cour, une élite a prospéré durant cette longue période, Alonso de Acevedo y Zúñiga en fait partie. Le noble galicien est la IIIe génération  à endosser le titre de comte de Monterrey. A quarante-cinq ans, il affiche sa réussite et décide la réalisation d’une demeure monumentale à Salamanca. Quand je dis monumentale, je ne plaisante pas, car le bâtiment d’aujourd’hui est loin de représenter le projet alors envisagé. Aux commandes de la réalisation hors norme, on trouve de grands noms comme  Rodrigo Gil de Hontañón que nous avons déjà croisé sur le blog. Vous pouvez le retrouver sur les chantiers du palacio de los Guzmanes ou de la cathédrale de Ciudad Rodrigo. Malheureusement Alonso n’a pas les finances à la hauteur de ses ambitions. Il va donc falloir réduire le projet pour garder ses ressources pour d’autres domaines comme la guerre. Le palais va peu à peu prendre une forme plus modeste. Toute est relatif, je vous l’accorde.

            Entre le siècle d’or et le XXème siècle, j’avoue que les sources en ligne sont peu loquaces. Les informations sont vagues, peu sourcées, y compris sur le site officiel où l’on s’appesantit sur l’ordre de succession. Cela a son importance puisque le palais est arrivé par le jeu des mariages dans le giron de la famille d’Alba. Cette famille espagnole a eu de nombreuses possessions depuis des siècles, comme le château de los Sarmiento que nous avons déjà visité sur le blog. C’est aussi à cette très riche famille que nous devons la donation du château de Coca, aujourd’hui école dépendante du ministère de l’agriculture. Le Palais de Monterrey par contre est toujours une de leur propriété privée.  

            Comme je vous le disais plus haut, j’ai trouvé assez peu de choses sur la vie du Palais avant qu’il ne soit,  en 1929, inscrit aux monuments historiques. Trente ans plus tard il redevient une résidence. En effet, il semble avoir eu différentes utilisations précédemment, comme une école, mais là encore des informations incertaines. Donc en 1949, la famille propriétaire des lieux décide de s’y installer à nouveau et de réaménager le vieux palais en conséquence. Attention, tout ceci ne se fait pas en un jour. Il faudra plusieurs années d’aménagement dont la modification la plus importante est la fermeture de la galerie supérieure, ancien espace de promenade tombé en désuétude. Cette première phase de réadaptation s’étend sur les années 1950/1960. En 1975, est créée la Fondation Casa de Alba pour gérer et valoriser l’immense patrimoine de cette grande famille. La famille d’Alba justement entame une deuxième étape importante dans les années 1980. Il s’agissait alors d’étanchéifier le bâtiment et de consolider certains éléments importants de l’extérieur comme les parties sculptées. Les ducs d’Albe furent récompensés pour cette partie des travaux par le prix Europa Nostra.

Longtemps le palais ne fut ouvert que quelques heures par semaine et uniquement pour des visites guidées en espagnol. A l’occasion de quelques événements des visites supplémentaires étaient proposées de temps à autre, mais toujours encadrées et guidées. Le palais restait en effet une demeure privée, chéri par la duchesse d’Alba, Cayetana Fitz-James Stuart qui avait contribué à transformer le vieux palais en riche maison du XXe siècle suite aux travaux déjà lancés par ses parents. C’est ici que la duchesse aimait à recevoir les grands de ce monde, artistes mais aussi rois d’Espagne ou président français. L’un des articles rapporte même que François Mitterrand aurait dormi ici. Quand la duchesse décède en 2014, elle laisse à son fils de multiples propriétés. Il viendra moins souvent mais il va travailler à l’ouverture du monument au grand public.

            La dernière étape de réhabilitation commence en 2016 avec l’approbation de la ville pour la restauration à laquelle la municipalité abonde financièrement. Ce dernier point est un sujet de crispation car certains avaient espéré que les habitants de Salamanque bénéficieraient en contrepartie de la gratuité pour les visites. Le débat se fait dans la presse, et ce n’est pas le sujet de l’article sur le blog. Quoiqu’il en soit la rénovation de la façade commence durant l’automne 2017.

            En mai 2018, le palais ouvre ses portes au public. Les trois premières années sont une réussite, surtout quand on prend en compte la fermeture due à la crise COVID. Durant ce premier cycle d’ouverture presque 45 000 personnes ont poussé les portes du Palais.  En juin 2021, l’espace visitable est agrandi avec l’accès aux communs dont la cuisine et les anciens logements du personnel. En septembre 2022, la fondation Alba décide de signer un accord avec la Casa Lis pour un billet combiné.

            J’ai la chance d’avoir enfin pu visiter le palais. C’est merveilleux de pouvoir admirer un palais meublé, pouvant encore  être habité. A ce titre, des parties sont évidemment fermées aux visiteurs. L’audio-guide, disponible en français, offre un très bon appui dans la découverte du palais qui se termine par l’accès à la tour avec un point de vue intéressant sur la ville. L’idéal est de prendre le tour complet en visite libre, comptez entre 1h et 1h30 pour profiter vraiment de la visite. J’ai particulièrement apprécié l’ouverture récente des parties de service si peu souvent conservées dans les autres demeures équivalentes. La visite est aussi largement consacrée à la famille d’Alba et à ses relations au fil des siècles avec différentes figures de l’histoire. On s’attarde en particulier sur la place de Santa Teresa, pour nuancer les propos de l’audio-guide vous pouvez lire l’excellent livre de Joseph Perez sur la vie de la sainte d’Avila. Petit regret, on ne peut pas photographier les intérieurs, vous savez combien ces mesures me chagrinent.  

La Purisima, en face du Palais, vue depuis les toits

            Vous pouvez continuer votre visite avec l’église de la Purisima juste en face, qui vaut le détour. Elle est aussi l’œuvre de la famille de Monterrey. Par ailleurs l'architecture particulière du Palais a inspiré de nombreux autres bâtiments dans la péninsule comme l'école de cavalerie à Valladolid. 

            Si vous l’avez visité n’hésitez à partager votre avis sur le palais.

Bonne lecture sur le blog.

A lire pour aller plus loin :

DE LOS MONTEROS Patricia, « Monterrey, el hogar inconcluso de Cayetana de Alba » in abc.es le 15 mai 2014

MELADO Ana, « Monterrey, el palacio de los Alba donde se diluyen las huellas de doña Cayetana » in abc.es le 29 février 2020

POBLACION Félix, « Los salmantinos pagarán por entrar al Palacio de Monterrey, restaurado con sus impuestos » in elsaltodiario.com le 11 mai 2018

RABADE Ricardo, « La Casa de Alba costeará la restauración de la fachada del Palacio de Monterrey » in elnortedecastilla.es le 19 novembre 2017

Restauration du palais de Monterrey sur premiosen.hispanianostra.org